Réponses :

  1. Île (ou îlot) Tromelin (ou île des Sables)
  2. Vanikoro
  3. Mas a Tierra (ou Mas Atierra ou Aguas Buenas ou île Robinson Crusoé ou Isla Robinson Crusoé)

Explication :

 

L’énigme évoquait trois îles (« Trois ombres émergeant des abîmes. Trois ombres cachées dans la nuit ») sur lesquelles des marins ou des passagers se sont retrouvés bloqués à la suite d’un naufrage ou d’un débarquement de force (« Trois pièges. Trois prisons. »).

 

La première était l’île Tromelin (ou île des sables). Il s’agit d’un banc de sable de 1700 m de long par 700 m de large situé dans l’océan Indien, au large de Madagascar. Son point cuminant est de 7 m (« La première n’est pas haute »). Elle est habitée par des colonies d’oiseaux marins et notamment de fous masqués et de fous à pieds rouges (« Les fous y dansent dans le vent : perçants leurs yeux sous leurs masques, écarlates leurs pieds »). Découverte en août 1722 par le navire français Diane, et baptisée île des sables, elle est mal notée sur les cartes maritimes de l’époque (« Elle est fourbe et dangereuse »). C’est probablement la raison du naufrage, dans la nuit 31 juillet au 1er août 1761 de L’Utile, une flûte de la Compagnie Française des Indes Orientales (« Diane n’est pas utile »). Le navire, commandé par le capitaine de La Fargue et qui assure le commerce entre Bayonne et l’île de France (actuelle île Maurice) avait embarqué illégalement à Madagascar environ 160 esclaves. L’équipage, et environ 80 esclaves, parviennent à gagner l’île à la nage. Le capitaine de La Fargue ayant perdu la raison à la suite du naufrage, c’est son second, Barthélémy Castellan du Vernet qui prend en main les opérations. Les hommes d’équipages arrivent à creuser un puit et trouvent de l’eau douce. Avec les débris de l’épave, ils construisent une embarcation de fortune. Le 27 septembre, l’équipage reprend la mer ; l’embarcation étant trop petite, les esclaves ne peuvent y prendre place. Castellan promet de revenir les chercher. Après quatre jours de mer, l’embarcation atteint Madagascar. L’équipage est rapatrié vers l’île de France à bord du Silhouette. Castellan implore le capitaine de se détourner vers l’île des sables pour secourir les esclaves, en vain. Le gouverneur de l’île de France l’a formellement interdit : la France ne faisant pas officiellement commerce des esclaves, l’incident ne doit pas s’ébruiter… En outre, craignant un blocus des Anglais, il ne veut pas s’encombrer de bouches inutiles. Castellan se résout à rentrer en France sans avoir tenu sa promesse (« Tout n’est que trahison »). En 1773, les naufragés sont signalés par un navire passant à proximité. Entre 1773 et 1774, deux tentatives de sauvetage échouent, dont l’une avec le navire La Sauterelle (« La sauterelle n’y peut rien »). Les conditions de mer sont trop mauvaises. Ce n’est finalement que le 29 novembre 1776 que le Chevalier de Tromelin (« Seul le Chevalier apportera la délivrance »), commandant la corvette La Dauphine (« La femme du fils aîné du Roi l’aidera ») récupère huit survivants (sept femmes et un bébé de 8 mois). Ils sont ramenés à l‘île de France et affranchis. Au XIXème siècle, l’île des sables est rebaptisée île Tromelin.

 

La deuxième est Vanikoro, un groupe d’îles (« Elle est multiple ») du sud de l’archipel des îles Santa Cruz (« protégée par la Sainte Croix »), partie la plus orientale des îles Salomon. Il s’agit du lieu de naufrage de La Boussole et de L’Astrolabe, les navires de l’expédition Lapérouse (« On y perd sa boussole et sa position ! »). Lorsqu’en 1784, Louis XVI lui demande d’organiser une grande expédition maritime dans le Pacifique, Jean-François de Galaud, Comte de Lapérouse, est déjà un marin d’expérience qui s’est notamment illustré pendant la guerre de Sept Ans et pendant la guerre d’indépendance américaine. Le but de l’expédition est double : accumuler des connaissances scientifiques, mais aussi marquer la présence française dans la zone que James Cook a déjà largement sillonnée au profit de la couronne anglaise (« Le Français, parti sur les traces de l’Anglais »). La Boussole et L’Astrolabe partent donc de Brest le 1er août 1785. En trois ans, ils vont amasser une somme colossale de données en quadrillant le Pacifique de manière impressionnante : cap Horn (janvier 1786), île de Pâques (avril 1786), Alaska (juillet 1786), îles Mariannes (décembre 1786), Macau (janvier 1787), Japon (août 1787), Kamchatka (septembre 1787), îles Samoa (décembre 1787) puis finalement Botany Bay, sur la côte est de l’Australie (janvier-mars 1788). En mars 1788, les deux navires quittent l’Australie en direction du nord. On ne les reverra plus… En France, la Révolution éclate l’année suivante, mais, malgré tout, on s’inquiète du fait que Monsieur de Lapérouse ne donne plus de nouvelles. En septembre 1791, la Constituante envoie une expédition de secours composée de deux navires, La Recherche et L’Espérance sous les ordres de l’amiral d’Entrecasteaux (« Pas d’espérance dans la recherche »). Il s’agit aussi d’une expédition scientifique qui fera notamment un gros travail de topographie de la Nouvelle Calédonie. En juin 1793, les navires passent à proximité de Vanikoro. En juillet, l’amiral d’Entrecasteaux meurt du scorbut. Les deux navires sont ensuite capturés par surprise par les Hollandais : ils ne savaient pas que le gouvernement révolutionnaire de la France venait d’entrer en guerre contre les Provinces-Unies… Il faudra attendre 1826 pour qu’un explorateur irlandais, Peter Dillon (le « petit Irlandais »), acquière la certitude que les navires de Lapérouse ont fait naufrage sur le récif de Vanikoro. Les habitants lui expliquent qu’il y a eu beaucoup de rescapés. Un groupe a reconstitué une embarcation avec les débris des épaves et a repris la mer quelques mois plus tard. D’autres sont restés vivre sur l’île. Le dernier étant mort quelques années avant l’arrivée de Dillon, on ne saura jamais si Lapérouse a survécu au naufrage et s’il faisait partie de ceux qui ont repris la mer. Quelques mois plus tard Dumont d’Urville et un certain Louis Legoarant de Tromelin (« l’homonyme du Chevalier ») localisent l’épave de L’Astrolabe. Celle de la Boussole ne sera localisée que lors de fouilles sous-marines réalisées en 1962-1964.

 

La troisième île, est l’île Mas a Tierra, ou île Buenas Aguas (« elle dégouline de bonne eau »). C’est une île montagneuse (« elle est très haute ») rendue célèbre par le séjour du corsaire écossais Alexander Selkirk. Ce dernier était navigateur du Cinque Ports, navire corsaire britannique commandé par le capitaine Stradling. En septembre 1704, alors que le Cinque Ports fait escale aux îles Juan Fernandez, Selkirk estime que le navire n’est pas en état d’affronter le cap Horn sans carénage. Le capitaine refuse de changer ses plans qui sont de doubler le cap au plus vite. Selkirk demande alors à être débarqué sur l’île Mas a Tierra. Le capitaine, trop heureux de se débarrasser d’une forte tête toujours à la limite de la mutinerie (« Il faut être forte tête pour s’y attaquer seul »), s’exécute. Selkirk est donc débarqué avec un fusil, un peu de poudre, un couteau et quelques cordes. Comme il l’avait prédit, le Cinque Ports fera naufrage peu après... Selkirk restera seul plus de quatre ans, vivant de la chasse des chèvres sauvages qui peuplent l’île (« (ou chèvre ?) »). Il sera finalement secouru le 1er (ou le 2 ?) février 1709 par le navire Duke (« en attendant que le Duc anglais ne passe »), commandé par le corsaire britannique William Dampier. Selkirk revient en Angleterre en 1711. Son aventure lui vaut la célébrité et attire notamment l’attention de Daniel Defoe qui s’en inspirera pour son roman Robinson Crusoé. Selkirk n’est cependant pas fait pour la vie à terre. Il reprend la mer en 1721 et meurt le 3 décembre de la fièvre jaune au large des côtes d’Afrique de l’Ouest. En 1966, l’île Mas a Tierra est rebaptisée île Robinson Crusoé par le gouvernement chilien.

 

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